Après
les assassinats de masse perpétrés en 2014 et début 2015, on
a pointé les failles de la DGSI en oubliant de préciser que la
police judiciaire a pour mission d'interpeller les auteurs d'un délit
ou d'un crime pour les présenter à la justice, et ensuite
d'enquêter à charge et à décharge sous le contrôle d'un
magistrat, et dans le cadre du code de procédure pénale... La
police judiciaire agit sur des faits passés. Sa mission n'est pas
préventive. Elle se doit d'attendre le passage à l'acte ou flagrant
délit pour intervenir. Le suspect peut encore renoncer à son
passage à l'acte...
L'aveu
et l'apposition d'une signature au bas d'un PV d'audition n'apportent
pas grand chose en matière de prévention d'activités clandestines
hostiles à venir. Le sujet qui a envisagé cette éventualité va
dire ce qu'il pense que l'interrogateur désire entendre, à ne pas
confondre avec la vérité. « Peut-on reprocher à un
fonctionnaire de police d'avoir cru les paroles d'une personne
suspecte ? Non, par contre, on pourrait lui reprocher de ne pas les
avoir crues s'il a dit la vérité. »
Les
recherches en sociologie montrent que presque tout le monde triche un
peu si on lui donne l'occasion. Un rappel à la morale n'est d'aucune
utilité chez une personne attachée fortement à des
convictions, religieuses ou autres. L'attachement à une
idéologie a pour conséquence de lui faire percevoir ses propres
croyances comme supérieures aux lois des hommes. L'individu préparé
à cette éventualité pourra être presque indifférent à son sort
et chercher à recueillir toutes les informations sur l'opérateur et
le fonctionnement du service. On semble s'étonner de découvrir que
des hommes ayant servi dans de très bonnes unités opérationnelles
soient passés de l'autre côté de la barrière. Quelle naïveté !
Les
liens qui unissent les individus d'une même nation ne sont jamais
indéfectibles. La fidélité n'est jamais totalement consentie car
elle repose sur des convictions personnelles. Le renforcement d'une
conviction gagne peu à peu en légitimité et finit par aboutir à
une loyauté supérieure. Sans sentiment appartenance à un groupe,
il n'y a pas trahison puisque la trahison incite à renoncer à un
lien au profit d'un autre. Qui est le plus blâmable, le traitre, le
félon, le renégat, ou ceux qui lui ont accordé leur confiance un
peu trop légèrement ? D'ailleurs, peut-on parler de trahison à
l'égard d'une personne qui na prononcé aucun serment de fidélité
? Il est d'autant plus facile pour des Français d'origine étrangère
d'outrepasser la loyauté nationale qu'ils ne partagent pas le même
ressenti de notre l'histoire qui représente un des fondements de
l'identité nationale.
La
société est confrontée à des jeunes qui ne peuvent ni dominer la
situation ni eux mêmes. Nietzsche parlait de la « domestication
des instincts ». Comment passer d'une discipline civique imposée à
l'obéissance d'une discipline librement consentie et acceptée ? À
toutes les époques, il y a eu des bandes de jeunes violents, mais
c'est devenu de nos jours une institution génératrice d'une
véritable situation belligène. Tout doit être violent comme dans
un roman de James Hadley.
L'homme
n'est qu'imparfaitement civilisé, une part du sauvage sommeille
toujours en lui et tout endoctrinement idéologie est de nature à
engendrer des « dévots ». Tous les individus sont,
à des degrés variables, des déviants de l'ordre établi. Le
passage à l'acte dépend du phénomène déclencheur, de la
personnalité, du choix de la méthode et de sa gradation ou non, des
circonstances, et des moyens disponibles.
On
est tout d'abord confronté à une question à tiroirs. On pourrait
tout aussi bien mettre en avant les grands points de repère
communément avancés par les travailleurs sociaux et qui
s'apparentent peu ou prou à la lutte de classes (qui
délaissent l'explication du phénomène de radicalisation de la
violence appartenant au champ de la criminologie) : aspects
socio-économiques, l'éducation parentale, l'instruction,
l'influence des logiciels de jeux violents, la ghettoïsation, la
neurophysiologie et la biochimie avec les substances qui jouent un
rôle dans l'agressivité, la colère (sérotonine, testostérone,
corticostéroïdes), etc. Lutte des classes encore et toujours,
chaque partie dénonçant la violence que l'autre lui fait subir,
violence (économique, sociale, etc.) subie qui à son tour «
justifie » en retour le recours à la violence. Toute diminution
d'agressivité verbale serait interprétée comme un signe de
soumission.
Force
est de constater qu'injecter toujours de plus en plus d'argent aux
initiatives sociales sans véritable contrepartie n'a jamais
contribué à la prévention. Le feu couve toujours sous le
couvercle. Et pour cause, il s'agit avant tout d'un comportement
déviant qui ne saurait être assimilé à une marchandise ou à un
service quelconque négociable. Au siècle des lumières, J.J.
Rousseau écrivait : « On a tout avec de l'argent hormis des mœurs
et des citoyens ». Cette grille de lecture ne saurait donc nous
apporter un véritable élément de réponse. Pire ! elle contribue à
confondre les causes avec les effets ou les conséquences. Agir sur
les symptômes d'une maladie n'a jamais éradiqué une épidémie,
or, la société est confrontée à une pandémie que je me garderais
bien de qualifier.
Comment
dégager des éléments d'information grâce à la connaissance du
passé ? Une façon de découvrir un événement possible en univers
incertain (fait et action dépendants des circonstances) et les
personnes les plus susceptibles de s'y livrer repose sur les
statistiques. Le renseignement intérieur a besoin de " tableaux
de bords ", encore faudrait-il que les analystes soient
autorisés à tenir des " stats " délivrées des questions
discriminatoires et qu'il leur soit permis d'accéder à tous les
fichiers, sans exception, afin d'en extraire les données utiles et
de pouvoir procéder à des recoupements, ce qui pour l'instant reste
un sujet tabous. Ensuite, utiliser les données pour lancer de
vastes campagnes de " pêche au chalut " et autres pots de
miel. Ces analystes devraient pouvoir être recrutés au choix sur
proposition d'une commission spéciale et non sur concours de la
fonction publique. Gardons-nous bien de confondre l'obligation de moyens avec l'obligation de résultats.
Dans
les milieux policiers, on en vient à regretter le bon vieux temps de
la Direction Centrale des Renseignements Généraux (DCRG) et ceux de
la Préfecture de Police (RGPP). Force est de reconnaître que
ces hommes et ces femmes, dont la plupart n'avait pas le statut d'OPJ
(ils se devaient de passer par un correspondant), abattaient un
boulot de renseignement irremplaçable. Les Renseignements
Généraux étaient un baromètre utile à la gouvernance.
Les RG étaient partout, quand ils ne l'étaient pas en personne, des
yeux et des oreilles de substitution étaient là pour capter
l'information et la transmettre ensuite à leur contact. Il était
impossible de réunir une " équipe sportive " sans que
l'un de ses membres ne renseigne, directement ou indirectement, les
RG ! Si le livre de Valérie Trierweiller a surpris l'Élysée, c'est
en partie, à cause de la disparition de la section presse des RG.
Comparaison n'est pas raison, rien à voir avec des individus décidés
à mettre à bas notre nation.